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Rubrique: SOINS
Auteurs: Conseil Scientifique du CNGE &.
Citer cet article: Conseil Scientifique du CNGE &. Vaccin Shingrix® contre le zona chez le sujet âgé : que faut-il en penser ?. exercer 2025;215:318-21.
Lien URL: https://www.exercer.fr/full_article/2915
Il existe peu d’études sur l’épidémiologie et le fardeau du zona en population générale. L’incidence du zona a été évaluée en 2022 par le réseau Sentinelles à plus de 500 cas chez les personnes de plus de 50 ans. Le zona est responsable de quelques décès, environ 40 par an, parmi les cas hospitalisés (1,5 %), principalement chez les sujets de 70 ans et plus (96 %)1. Le zona peut avoir un impact important lié aux douleurs, mais également aux complications ophtalmiques, neurologiques ou viscérales2.
Le vaccin Shingrix® est recommandé depuis février 2024 et remboursé depuis décembre de la même année. Il est indiqué pour la prévention individuelle du zona et des névralgies post-zostériennes (NPZ) chez les adultes âgés de 65 ans et plus immunocompétents, ou dès l’âge de 18 ans chez ceux à risque accru de zona. C’est un vaccin recombinant, adjuvanté, qui peut être administré aux patients immunodéprimés contrairement au Zostavax®, vaccin vivant qui n’est plus commercialisé. Cette recommandation est essentiellement basée sur les résultats des essais ZOE-503 et ZOE-704. Ces deux essais ont été menés entre 2010 et 2011 dans 18 pays auprès de respectivement 16 160 et 13 900 sujets volontaires. Dans ZOE-50, les volontaires étaient immunocompétents et recrutés à partir de l’âge 50 ans, et dans ZOE-70, ils l’étaient à partir de 70 ans. Il s’agissait d’essais cliniques randomisés en double insu. Pour chacun de ces essais, le critère de jugement principal était le risque de développer un zona. Les résultats des deux essais ont été rassemblés pour évaluer le risque de développer une
névralgie post-zostérienne, mais à titre exploratoire.
Pour les patients âgés de 70 ans et plus immunocompétents, il fallait vacciner 34 sujets (IC95 % = 29-39) pour éviter la survenue d’un zona dans les 3,7 années suivant l’intervention et 293 sujets (IC95 % = 203-526) pour éviter la survenue d’une douleur post-zostérienne (résultat exploratoire) dans le même délai suivant l’intervention5.
Le taux d’effets indésirables graves était similaire entre le groupe vacciné et le groupe placebo, avec respectivement 0,2 et 0,1 % de survenue et une incidence de 2 cas pour 1 000 participants par an, quelle que soit l’injection allouée. Les effets indésirables bénins étaient significativement plus fréquents dans le groupe Shingrix® avec 74,1 % de patients signalant une réaction au site d’injection, essentiellement de la douleur, versus 9,9 % dans le groupe placebo. Les réactions systémiques, notamment la fatigue, étaient également significativement plus fréquentes dans le groupe Shingrix® avec 53 % de réactions versus 25,1 % dans le groupe témoin.
Si ces éléments peuvent aider les soignants et les personnes à décider pour la protection individuelle du zona, plusieurs limites sont à relever :
– l’absence d’essai spécifique sur les populations ciblées par la recommandation de la Haute Autorité de santé (HAS), en particulier celles âgées de 18 ans et plus avec facteur de risque. Le choix de débuter à 65 ans ne correspond pas exactement aux catégories d’âges étudiées (50, 60 et 70 ans) ;
– l’absence d’étude convaincante sur l’impact médico-économique national5 ;
– le manque de données sur l’impact de la vaccination sur la qualité de vie ;
– le manque de données sur les personnes ayant déjà eu un zona ou ayant reçu une vaccination par Zostavax® ;
– la seule étude sur l’efficacité du vaccin au long cours (financée par GSK) avait dix années de recul et a observé une réduction relative du risque de zona de 73,2 % (IC95 % = 46,9-87,6) la 10e année (risque absolu dans le groupe placebo = 8,7 %)6.
À partir des résultats cliniques, le conseil scientifique s’interroge sur la pertinence de la recommandation du vaccin chez tous les sujets de 65 ans et plus immunocompétents, quel que soit leur état de santé, leurs facteurs de risque et comorbidités. En l’absence d’étude nationale convaincante sur l’impact
médico-économique et compte tenu du prix élevé et de la cible très large, le conseil scientifique du CNGE s’interroge sur le rapport coût/efficacité de cette vaccination et sur l’importance de l’enveloppe budgétaire qui y est dédiée. Ces interrogations sont également soulevées par le Centre fédéral d’expertise des soins de santé belge qui a considéré que l’équilibre coût/efficacité était négatif au prix actuel du vaccin, avec toutes les limites d’un système de santé et d’un contexte différent du système français7.
Dans ce contexte, le CNGE a construit un outil d’aide à la décision dont la méthode d’élaboration a été empruntée au Harding Center for Risk Literacy8. Cet outil vise à fournir des informations limitées, mais factuelles sur les bénéfices et les risques cliniques de Shingrix®, à l’usage des professionnels de santé de premier recours. L’utilisation de cet outil doit être réservé aux patients à partir de 70 ans et plus sans risque accru de zona, devant l’absence de données dans d’autres populations.
There are few studies on the epidemiology and burden of shingles in the general population. The incidence of shingles was estimated in 2022 by the Sentinelles network at more than 500 cases in people over 50 years of age. Shingles is responsible for a few deaths, approximately 40 per year, among hospitalised cases (1.5%), mainly in people aged 70 and over (96%)1. Shingles can have a significant impact in terms of pain, but also in terms of ophthalmic, neurological or visceral complications2.
The Shingrix® vaccine has been recommended since February 2024 and reimbursed since December of the same year. It is indicated for the individual prevention of shingles and postherpetic neuralgia (PHN) in immunocompetent adults aged 65 years and older, or from the age of 18 years in those at increased risk of shingles. It is a recombinant, adjuvanted vaccine that can be administered to immunocompromised patients, unlike Zostavax®, a live vaccine that is no longer marketed. This recommendation is based primarily on the results of the ZOE-503 and ZOE-704 trials. These two trials were conducted between 2010 and 2011 in 18 countries with 16,160 and 13,900 volunteers, respectively. In ZOE-50, volunteers were immunocompetent and recruited from the age of 50, and in ZOE-70, they were immunocompetent and recruited from the age of 70. These were double-blind, randomised clinical trials. For each trial, the primary endpoint was the risk of developing shingles. The results of the two trials were combined to assess the risk of developing postherpetic neuralgia, but this was exploratory.
For immunocompetent patients aged 70 years and older, 34 subjects (95% CI = 29-39) needed to be vaccinated to prevent the occurrence of shingles within 3.7 years after the intervention, and 293 subjects (95% CI = 203-526) needed to be vaccinated to prevent the occurrence of postherpetic pain (exploratory outcome) within the same time frame after the intervention5.
The rate of serious adverse events was similar between the vaccinated group and the placebo group, with 0.2% and 0.1% occurrence, respectively, and an incidence of 2 cases per 1,000 participants per year, regardless of the injection allocated. Mild adverse events were significantly more common in the Shingrix® group, with 74.1% of patients reporting an injection site reaction, mainly pain, versus 9.9% in the placebo group. Systemic reactions, including fatigue, were also significantly more common in the Shingrix® group, with 53% of reactions compared to 25.1% in the control group.
While these findings may help healthcare professionals and individuals decide on individual protection against shingles, several limitations should be noted:
– the lack of specific trials on the populations targeted by the French National Authority for Health (HAS) recommendation, particularly those aged 18 years and older with risk factors. The decision to start at age 65 does not exactly correspond to the age groups studied (50, 60 and 70 years);
– the lack of convincing studies on the national medical and economic impact5;
– the lack of data on the impact of vaccination on quality of life;
– the lack of data on people who have already had shingles or received a Zostavax® vaccination;
– the only study on the long-term efficacy of the vaccine (funded by GSK) was conducted ten years ago and observed a relative reduction in the risk of shingles of 73.2% (95% CI = 46.9-87.6) in the 10th year (absolute risk in the placebo group = 8.7%)6.
Based on the clinical results, the scientific advisory board questions the relevance of recommending the vaccine for all immunocompetent individuals aged 65 and over, regardless of their health status, risk factors and comorbidities. In the absence of a convincing national study on the medical and economic impact, and given the high price and very broad target population, the CNGE's scientific advisory board questions the cost-effectiveness of this vaccination and the size of the budget allocated to it. These questions have also been raised by the Belgian Federal Health Care Expertise Centre, which considered that the cost-effectiveness ratio was negative at the current price of the vaccine, with all the limitations of a health system and context that differ from those in France7.
In this context, the CNGE has developed a decision-making tool based on the method used by the Harding Center for Risk Literacy8. This tool aims to provide limited but factual information on the clinical benefits and risks of Shingrix® for use by primary care professionals. The use of this tool should be reserved for patients aged 70 and over with no increased risk of shingles, given the lack of data in other populations.